Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Histoires d'une balade à deux sur une coque à travers le Pacifique (pour commencer !)

02 Jun

Les rios du Darien : on se met au Vert !

Publié par Cécile et Damien

Les rios du Darien : on se met au Vert !

.

Après une journée de navigation où nous avons bien avancé, un peu « pressés » par les orages par ailleurs, nous entrons dans le golf de San Miguel qui marque l’embouchure des grands rios du Panama. Nous y sommes accueillis par les premiers troncs d’arbre à éviter soigneusement, par une eau brusquement jaunâtre, ainsi que par une foule de pêcheurs, et nous mouillons à l’abri d’une île.

Le lendemain, à la faveur de la marée montante, nous partons direction le rio Sabana, pour une petite journée de navigation. Le ciel est assez tourmenté, nous entendons quelques coups de tonnerre, rien de bien méchant, et continuons notre route Nord-Est dans l’embouchure, par 10 nœuds de vent arrière.

Après 2 heures de ce régime, le ciel prend de profonds contrastes bleus et blancs, la mer devient encore un cran plus jaune. Le vent nous vient toujours de l’arrière. L’inconfort du roulis rendant la tenue des voiles en ciseaux délicate, nous enroulons le génois.

A peine la manœuvre achevée et brusquement, en 30 secondes à peine, la température de l’air tombe de 5 ou 10 °C. Un coup d’œil à l’horizon confirme l’inévitable : il est blanc d’écume, et nous allons prendre quelque chose de fameux sur la tête… Le vent tourne de 180° La grand-voile sans ris alors est affalée au plus vite, pas assez cependant, et c’est dans des conditions costaudes que je finirai de la saucissonner à la hâte pendant que Cécile barre face au vent. La visibilité est tombée à zéro, la pluie cisaille la peau comme de la silice au milieu d’une tempête de sable. Le moteur pousse vaillamment COLIBRI face au vent, en attendant que ce grain impressionnant passe.

Mais il n’a pas l’air d’avoir envie de s’arrêter ! Il faudra attendre 45 minutes, le temps de raisonner une annexe un peu trop remuante au milieu d’une mer qui grossit, pour voir enfin le vent se calmer. Alors apparait le petit passage « Boca Chica », un raccourci pour atteindre le rio. Une mesure du vent nous a donné à un moment 36 nœuds. Mais assurément, les rafales atteignaient 40 ou 45 nœuds…

Ça décoiffe ! D’ailleurs, vous pourrez voir tout cela en vidéo ci-dessous !

C’est sous des orages effrayants que nous poursuivons. Les éclairs tombent de tous les côtés, jamais trop près cependant, mais quelle puissance ! Emmitouflés dans les vestes de quart et nous réconfortant avec du thé brûlant, nous entrons finalement dans le rio Sabana, puis le rio Iglesia, et enfin nous poursuivons sur l’estero Tigre, notre destination. Nous naviguons jusqu’au bout, à la croisée de plusieurs petits affluents, et mouillons dans 6 mètres d’eau, la marée est haute. Si vous voulez nous retrouver, les coordonnées sont : 08°26,4’N 078°03,1’W. La pression se relâche, et nous dormirons merveilleusement en attendant de découvrir les lieux demain matin !

Le matin, réveil en fanfare : à 6h, les cris stridents des perruches marquent le début de journée de toute la forêt ! Nous nous y habituerons très vite… Les lieux sont très paisibles le reste du temps. Il n’y a pas âme qui semble vivre ici, et nous ne verrons aucun humain durant toute la semaine que nous passerons ici. Cependant les apparences sont trompeuses, et après plusieurs balades en annexe, on découvre des indices : coups de machettes, arbres fruitiers et jardins de tubercules prouvent que les tributs locales ne sont pas si loin.

Notre terrain de jeu est grand et varié : il s’agit d’un labyrinthe de boucles d’eaux passant tantôt dans la mangrove, tantôt dans des forêts plus denses, et au centre un genre de lac s’asséchant à marée basse et faisant le bonheur des échassiers.

Au niveau des animaux, nous ne pourrons pas concurrencer National Geo, avouons-le ! De nombreux oiseaux, mais pas d’espèces fantastiques comme l’aigle Harpie ou le Jaguar. Des petits crabes rouges grimpants aux arbres, deux jeunes iguanes ondulant dans l’eau, quelques lucioles, pas mal de papillons, beaucoup de moustiques et juste une fois de nuit, deux yeux brillants d’un petit mammifère non identifié.

Le cours du temps est évidemment toujours marqué par les marées, nous ne sommes qu’à 10 milles à l’intérieur des terres. A marée descendante, les veines du rio se rétrécissent et semblent essayer de nous emprisonner dans la vase qui surgit et annonce le début du festin des aigrettes. L’eau est grasse de toutes les humeurs sécrétées par la forêt. A la marée montante, tout le monde semble retourner dans son environnement secret, l’eau est renouvelée, un nouveau cycle commence.

Il pleut régulièrement, parfois abondamment. Il est arrivé de faire le plein de nos 60 litres de seaux en 15 minutes. A plusieurs reprises nous nous sommes faits tout petit, tandis que les éclairs tombaient à quelques kilomètres. Le vent se lève vers midi lorsqu’il fait beau, mais le reste du temps et surtout la nuit, c’est une chape de plomb qui rend le sommeil difficile. Ce sentiment d’étouffement est-il une des composantes de ce que l’on appelle l’Enfer Vert ?

Après une semaine cependant, nous avons suffisamment profité des lieux. Nous sommes heureux d’avoir un peu joué sur notre bonne étoile pour effleurer du doigt ce que peut être la navigation dans les rios d’Amérique centrale. A présent, il va être temps de lever l’ancre, d’aller « à la ville » pour faire les derniers approvisionnements et refaire tous les pleins (sauf de l’eau, vous l’aurez compris, on en a assez !).

Le "retour à la vie" est étrange, on reprends contact avec le vent, la mer, les gens... L'arrivée à La Palma se passe bien, nous parvenons à acheter à peu près tout ce que nous voulions et les gens sont très sympathiques : ils nous expliquent qu'ils ne voient pas beaucoup de touristes, nous en sommes très fiers !

A l'heure d'écrire ces ligne, la veille du grand départ, nous entendons régulièrement le long de la coque les frottements de troncs d'arbres, emporté par la marée descendante. A l'instant, l'engin faisait un peu plus que la longueur du voilier. Drôle d'endroit quand même, ça dépayse !

Demain donc, 4 juin, nous partons pour 7 à 10 jours de mer vers les Galapagos, une traversée d’ordinaire assez peu réjouissante car traversant la ZCIT (le pot-au noir si vous préférez), et rendue un peu plus compliquée encore par le fait qu’en cette saison avancée, les vents dominants sont… en plein dans l’étrave ! Nous vous tiendrons donc au courant à notre arrivée dans les lieux qui ont rendus Darwin célèbre et qui nous font rêver depuis bien longtemps malgré le mercantilisme qui règne désormais sur l’archipel et que nous espérons voir le moins possible pour nous concentrer sur le Beau !

PS : N’hésitez pas à retourner voir les articles précédents, ils ont parfois fleuris d’une vidéo. Reste à réaliser le plus gros projet : les San Blas sur et sous l’eau, ça va venir et pour les abonnés (un clic en haut à droite pour en être) vous en serez informés dès sa sortie !

Une bienvenue musclée dans le Darien !

A notre arrivée après le grain, l'annexe un peu en vrac...

A notre arrivée après le grain, l'annexe un peu en vrac...

Le jour se lève, et voici COLIBRI bien calé dans ce décor incroyable !

Le jour se lève, et voici COLIBRI bien calé dans ce décor incroyable !

Les perruches nous font un accueil du tonnerre !

Les perruches nous font un accueil du tonnerre !

A marée basse, les berges du rio tentent désespérément d'embrasser notre bateau

A marée basse, les berges du rio tentent désespérément d'embrasser notre bateau

La mangrove est par endroits très massive...

La mangrove est par endroits très massive...

... et la sortie, toujours un peu dissimulée

... et la sortie, toujours un peu dissimulée

Les petits crabes sont légions...

Les petits crabes sont légions...

... et leurs admirateurs aussi :

... et leurs admirateurs aussi :

Courlis,

Courlis,

Hérons,

Hérons,

Martins pêcheurs,

Martins pêcheurs,

Tous attendent sagement leur heure pour déjeuner

Tous attendent sagement leur heure pour déjeuner

Ou l'heure de la sieste !

Ou l'heure de la sieste !

Certains paysages font penser à des vergers inondés...

Certains paysages font penser à des vergers inondés...

... mais avec des bigorneaux dessus !

... mais avec des bigorneaux dessus !

Et les figuiers étrangleurs sont très affectueux

Et les figuiers étrangleurs sont très affectueux

La pluie arrive !

La pluie arrive !

Lorsqu'elle prend fin, les paysages se subliment...

Lorsqu'elle prend fin, les paysages se subliment...

Et deviennent irréels...

Et deviennent irréels...

Enfin, la journée s'achève au son des oiseaux et des insectes, nous abandonnant aux lucioles !

Enfin, la journée s'achève au son des oiseaux et des insectes, nous abandonnant aux lucioles !

Commenter cet article
T
he ben (personne n'ayant osé la faire, je me lance) après votre passage, ça s'appellera "Les rios du Damien" !! bon, après c'est le tour de Cécile, promis ! Bisous
Répondre
T
Des photos toujours très belles..l'aventure se prolonge et j'ai bon espoir de voir DAMIEN (le bateau) reprendre la mer en 2017.<br /> Bises à vous deux
Répondre
J
Super les paysages!! Ont pensent à vous deux :) bisous!
Répondre
L
Superbe comme d'hab surtout dam en tshirt mouillé !!!<br /> Bon vents a bientot !
Répondre

À propos

Histoires d'une balade à deux sur une coque à travers le Pacifique (pour commencer !)